Par « musique celtique », on entend généralement toutes les musiques traditionnelles originaires des différentes nations celtes. Bretagne, Irlande, Ecosse, Pays de Galles, Cornouailles, Galice, Asturies... Toutes ces régions et pays ont en commun les langues et cultures celtiques, mais aussi et surtout un goût prononcé pour la musique et la danse. Prétexte à de nombreux rassemblements festifs, la musique celtique connaît aujourd’hui une grande popularité dans le monde entier. Qui ne connaît pas le célèbre Festival interceltique de Lorient ? Ou encore les pipe bands écossais avec leurs fameuses cornemuses au son si particulier ? Et qui n’a jamais entendu ces mélodies de violon entêtantes qui donnent irrésistiblement envie d’entrer dans la danse ?
Cependant, la variété est telle qu’on ne peut pas parler d’une seule musique celtique : en réalité, il s’agit de « musiques celtiques » au pluriel, qui sont le fruit d’un héritage culturel important. Dans l’Antiquité, les Celtes accordaient une place centrale à la musique, qui a par la suite évolué au fil des siècles en se modernisant considérablement – et de ce fait, devenant intemporelle.
Un peu d’histoire : civilisations celtes et traditions celtiques
Pour commencer, qui étaient les Celtes ?
Le terme « Celtes » désigne des peuples indo-européens originaires de la vallée du Danube, qui ont par la suite migré vers l’Europe occidentale et y ont vécu pendant une grande partie de l’Antiquité. Il n’existait d’ailleurs pas de peuple celte unique : il s’agissait de plusieurs peuples partageant des caractéristiques sociétales, culturelles et linguistiques communes.
Il n’y avait par exemple ni Etat, ni administration publique celte ; mais plusieurs sociétés tribales reposant sur un droit privé. Outre leur amour pour la guerre, les Celtes vénéraient beaucoup la nature, dont il s’inspiraient pour leurs objets d’art et d’artisanat (ils étaient par ailleurs de formidables artisans). Les rituels religieux avaient lieu dans des cadres naturels tels que des forêts, ou des sanctuaires à ciel ouvert. Concernant la religion, là aussi les peuples celtes avaient beaucoup de croyances et pratiques similaires. Ils croyaient en une vie après la mort et en des êtres surnaturels venus de l’au-delà ; et avaient des dieux importants en commun tels que Lug, dieu solaire ou encore Taranis, le dieu de la foudre. Le sacerdoce des druides, enfin, était une véritable institution panceltique : on retrouve des traces de la présence de druides en Grande-Bretagne ou encore en Gaule. Vous savez, ce sont ces personnages en longue robe blanche, qui vont cueillir le gui dans la forêt avec leur serpe et concocter des potions magiques censées donner une force surhumaine… non attendez, on me dit que ce sont des stéréotypes véhiculés par une célèbre bande dessinée ! Toujours est-il que les druides avaient un rôle essentiel dans les différentes sociétés celtes, en tant qu’officiers religieux et guérisseurs.
Et qu’en est-il donc de la musique ? Eh bien, elle occupait une place très importante. Sa fonction n’était d’ailleurs pas que profane : elle avait aussi un caractère religieux prononcé. Le poète et musicien, appelé barde, faisait en effet partie de la classe sacerdotale – c’était donc un personnage important et respecté au sein de la société. Souvent accompagné d’une harpe ou d’une lyre, il mettait ainsi son art au service du sacré, chantait les louanges des héros ou faisait des satires. Rien à voir donc avec Assurancetourix, attaché à un arbre et bâillonné à chaque banquet final des aventures d’Astérix !
Cependant, la transmission chez les Celtes était essentiellement orale : on ne retrouve aucune trace écrite laissée par eux. Ce qu’on entend aujourd’hui par musique celtique ne s’inspire donc pas réellement de l’art celtique antique en lui-même ; l’héritage se fait plutôt à partir du Moyen-Âge. À cette période, une grande partie des civilisations celtes a déjà disparu, dûe à l’invasion romaine. Mais certaines régions comme l’Irlande ou le Pays de Galles, n’étant pas romanisées, ont conservé leurs traditions celtiques et donc leur musique. Au fil du temps, les anciens airs médiévaux ont progressivement évolué, jusqu’à devenir la musique celtique actuelle que nous connaissons. Le terme “musique celtique” apparaît quant à lui aux alentours du 19e siècle.
La musique celtique aujourd’hui
De nos jours, la musique celtique est très populaire en France et dans le monde entier ; les rassemblements festifs sont nombreux. On peut citer le très célèbre Festival interceltique de Lorient (créé dans les années 1970), qui réunit toutes les nations celtes pendant dix jours via plusieurs spectacles, parades et ateliers de découverte des musiques et danses celtiques. Ou encore le festival Yaouank à Rennes, qui dure deux semaines et se clôture par le plus grand fest-noz de Bretagne.
Justement, parlons du fest-noz (en breton : fête de la nuit). Ce rassemblement festif où l’on danse au son de la musique traditionnelle bretonne, très apprécié des jeunes comme des moins jeunes, trouve ses origines dans les milieux ruraux. Les gens dansaient pour célébrer les moissons et les récoltes, ou tout simplement pour se requinquer après une dure journée de labeur : en gros, tout était prétexte à danser et s’amuser ! Mais dans les années 1930, ces rassemblements connaissent un fort déclin. Ce n’est que dans les années 1950 que le fest-noz renaît de ses cendres, notamment grâce à des artistes renommés comme Loeiz Ropars, les frères Morvan ou les sœurs Goadec qui ont remis le kan ha diskan (chant traditionnel breton) au goût du jour. Puis dans les années 1970, Alan Stivell reprend le répertoire traditionnel à la harpe et popularise la musique celtique et le fest-noz par la même occasion. C’est alors que le mouvement folk celtique prend de l’ampleur et devient un véritable phénomène en France et à l’international.
Aujourd’hui, les fest-noz réunissent chaque année des milliers de participants en Bretagne mais aussi dans d’autres régions de France, et sont d’incontournables rendez-vous intergénérationnels. La convivialité et le partage sont les maîtres mots de ces rassemblements ouverts à tous, aux débutant.e.s comme aux passionné.e.s. À la musique traditionnelle bretonne se mêlent désormais d’autres genres musicaux tels que le rock, le jazz, l’électro et même parfois d’autres musiques traditionnelles : toutes les associations sont permises ! C’est un véritable brassage culturel qui va bien au-delà des frontières de la Bretagne.
Le fest-noz a d’ailleurs été inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO en 2012 – ce n’est vraiment pas une petite chose !
Quelques instruments et musicien.ne.s phares
Parmi les instruments emblématiques de la musique celtique, on retrouve la harpe celtique aux sonorités douces et féeriques. Très présente en Irlande, c’est même l’un des symboles officiels du pays. Elle se distingue surtout par sa plus petite taille par rapport aux autres harpes (90 cm) et sa colonne arquée. Alan Stivell a contribué à populariser cet instrument dans les années 1970 et a ainsi influencé de nombreux artistes par la suite, telles que la Canadienne Loreena McKennitt ou encore la Bretonne Cécile Corbel.
Il y a aussi le violon (appelé fiddle en anglais), instrument phare de la musique irlandaise à ne surtout pas confondre avec un violon classique. Très polyvalent, cet instrument est aussi bien utilisé pour jouer des complaintes mélancoliques que des airs endiablés appelant à la danse. Parmi les musicien.ne.s connu.e.s, on peut citer les Irlandais John Doherty et Kevin Burke, ou encore l’Américaine Eileen Ivers.
Et bien sûr on retrouve la célèbre cornemuse, notamment dans les pipe bands, ces ensembles musicaux traditionnels écossais qui défilent en jouant des airs souvent assez solennels.
Il existe encore de nombreux instruments tels que la flûte et le bodhrán irlandais, le biniou et la bombarde emblématiques de la Bretagne, la gaïta, petite cornemuse que l’on trouve en Galice et aux Asturies… La liste est longue !
Et enfin, on ne peut pas parler de musique celtique sans évoquer les nombreux groupes traditionnels, qui en réunissant divers instruments forment ainsi un ensemble de sonorités harmonieuses. Les groupes plus récents mélangent souvent plusieurs genres musicaux.
Voici une petite liste non exhaustive, à écouter si le cœur vous en dit !
Les Ramoneurs de Menhirs, Loened Fall, Matmatah, Diaouled Ar Menez, Bagad Kemper (Bretagne)
The Dubliners, The Chieftains, Beoga (Irlande)
The Tannahill Weavers, Battlefield Band, Runrig (Écosse)
Tanxugueiras (Galice)
La cartouche
Grande amatrice de musique celtique (et de fest-noz, est-ce dû à mes racines bretonnes ? Certainement !), à force d’en écouter j’ai fini par m'intéresser plus en détail à son histoire et son impact sur la scène musicale actuelle.
Sources :
“Histoires d'instruments : la harpe”, récupéré sur collectionsdumusee.philharmoniedeparis.fr, [en ligne]
Jégat M., “Le fest-noz, rassemblement festif basé sur la pratique collective des danses traditionnelles de Bretagne”, 2006, récupéré sur ich.unesco.org, [en ligne]
Vaillant J., “Gaule. Le barde celtique ressemblait-il à Assurancetourix ?”, 7 avril 2019, récupéré sur letelegramme.fr, [en ligne]
“Ballade celte à la découverte des musiques celtiques”, novembre 2008, récupéré sur yvelines.fr, [en ligne]
Lucrèce, “Les Celtes : origines et histoire”, 7 décembre 2022, récupéré sur histoire-pour-tous.fr, [en ligne]
Les Celtes, Juliette Wood (version française : 1999, éditions Gründ)
Les Celtes, Henri Hubert (initialement paru en 1932, éditions Albin Michel, 2001)